Des lamentations et éructations, eu égard à l'attitude parfois dépravée de certaines jeunes femmes, se font entendre, surgissent presque de partout. Des étiquettes d'agent d'obscenité et d'immoralité leur sont accolées au dos. Minuit sonnante, cambrés sous des lives sur les réseaux sociaux, les admirateurs-contempteurs s'offrent pourtant le plaisir luxueux d'assister à ces ébats imputés à blâme ou à déshonneur et à émettre après jubilation des commentaires saugrenus. Ils archivent en faisant des captures d'écran, des enregistrements vidéo. Une bonne façon hypocrite de porter les jeunes à revenir à la moralité : rester plantés là, pendant des nuits, à ne rien trouver mieux que de baver sur leurs fesses.

En cette période de confinement, le phénomène d'Instacul est très répandu. Dans leur Story d'Instagram, les jeunes femmes s'animent en challenges ou s'enflamment à relever des défis consistant à mieux mettre en branle le postérieur de manière obscène, du pur twerk, sous la houlette de certains musiciens, footballeurs, DJ et autres personnalités détenant une certaine popularité. La gagnante du « beau jeu » est désignée par les spectateurs du Live. Et celle-ci aura été rémunérée ; par exemple le footballeur haïtien Donald Guerrier a délaissé 500 dollars américains à la meilleure danseuse d'un Live qu'il présidait. Mais certaines femmes ne sortent de ces concours-là qu'avec de la popularité. En vrai, qu'avec du badbuzz.

Dans ce mode de société dite capitaliste, d'ailleurs sexiste, le corps féminin est très souvent considéré comme un objet sexuel, comme un moteur dont la finalité est de porter à récréer et dépouiller le sexe masculin de ses angoisses. La femme doit suivre ce canon esthétique établi par ce mode de société, se courber à ce qui, selon cette dernière, doit être l'idéal d'une femme parfaite. Une femme est validée lorsqu'elle répond au souci d'une féminité obscène. Plus elle incite l'autre sexe à baver et à fantasmer, plus elle est dite sexy et classe. Pour obtenir de la société phallocrate un gage de la reconnaissance, il faut accepter de se faire mater et de se courber à leur canon esthétique. Une femme, ça doit être douce, sensuelle, provocante et obéissante. Cependant, pas trop juste assez à leur goût, car sinon ils te traitent de pute.

Ces jeunes femmes donnent ce que l'on attend d'elles. En ces temps-ci par exemple, la majorité des hommes voudraient d'une femme qui sait mouvoir sa hanche et ayant les fesses bien galbées. On les classe "objets de plaisir" et lorsqu'elles choisissent de s'y accommoder, elles sont traitées de tous les vocables exécrables. Ces femmes dansent jusqu'à dévoiler leur nudité dans le souci de se faire valider. Plus elles se déhanchent, plus leur nombre d'abonnés vont s'amplifier. La jeunesse est, en ce sens, le produit ou le fruit de son quotidien. Si le mâle se croit tout puissant, c'est parce que la société l'a gradé. Même s'il est le plus petit dans la famille, il reçoit de bien meilleurs traitements que sa grande sœur. Même sa mère l'oblige à méditer qu'il est un homme. Voici ce que fait un homme et ce que seraient les limites de la femme. C'est exactement cette société qui demande aux jeunes femmes d'aujourd'hui de se livrer à la débauche.

À mesure qu'une jeune femme se dépouille de sa dignité, ses fans augmentent. Le modèle de société capitaliste aime vendre en toute évidence le sexe, et les clients adorent leur marchandise. Tout ce qui est pornographique attire du monde. Ils disent que les jeunes d'aujourd'hui ne lisent pas mais au lieu d'acheter des livres pour leurs rejetons, ils leur achètent de préférence des jeux vidéos, téléphones et habits classes. Avant de juger, il faut s'en dépouiller, bandes d'hypocrites. Allez, les filles, balancez vos culs sur Instagram. Mais n'oubliez pas que c'est cette même société qui apprend à leurs fils d'épouser vierges et puritaines.