Natacha ou Destin d'une descente horizontale

Natacha ou Destin d

Mon histoire commence comme un chant cassé qui résonne sur le fil du temps. Je ne sais pas comment la décrire, mais elle est un gros lot de fardeaux sur mon corps.

Bref! Je voulais me présenter, mais je ne veux pas un jour que mes parents et amies tombent sur la première page de mon histoire. Je laisse ce travail au temps. Peut-être un jour qu’il les dévoilera que c’était moi. Mais à l’instant, j’aimerais vous dire que je suis une adolescente de 15 ans. Je suis au Lycée Saint Pierre, je vis aussi avec mes parents.

À mon âge, j’estime que j’aurais dû avoir un un
souci pour mon avenir. Mais au fur et à mesure, la passion diminue. Je m’en fous de la vie. Je m’en fous de tout. J’ai même ignoré le diplôme que j’ai toujours voulu décrocher en médecine et en droit. À présent, je mène une vie de bohème. Tout ce qui m’intéresse, c’est le plaisir sexuel. La semaine dernière, j’ ai couché avec plus de 12 hommes et je n’étais pas satisfaite. Je n’aime pas quand on me baise doucement. Il faut déchirer mon sexe. Le décoller même s’il le faut.


Les jours passent, la nuit aussi. Mon sexe a de plus grande envie. Mon plus grand problème avec mon sexe, c'est qu'il est insatiable. Il veut encore. Il veut toujours…

Hier soir, maman m’a obligé à me rendre à l’église, l’instant précis où l'envie me consumait. J’ai presque rendu mon âme. Je m’asseyais dans le dernier rangé. Je me masturbai. De là étant, je développe une habitude de continuer d’aller à l’église, ce n’est pas pour écouter les beaux chants ni pour espérer un éventuel retour du Christ. Mais c’est dans ce lieu que j’exploite le mieux mon sexe. J’apprends à connaître mon corps…

Chaque dimanche soir, je suis toujours accompagnée de ma bible et de mon livre de chant, portant de longue jupe aussi, mais je suis toujours sans sous-vêtements pour faciliter mes doigts à remplir mieux les taches.

Quand on prie, j'ouvre grands les yeux, regardant les fesses bombées des jeunes filles... j'exploite leur corps, je vis en elles... puis mon sexe tremble, vibre énormément fort.

Ma vie devient ainsi. Je ne vais plus à l’école. D’autres désirs me montent à la tête. Depuis que j’avais rêvé une femme de très beau visage et de longs cheveux qui me donna une bague, je fredonne une chanson que je ne sais pas depuis quand je l’ai mémorisée.


«  Èzili Freda manman vèmin
Ou pa wè mwen nan dlo
mwen nan ka
Èzili Freda manman vèmin
Ou pa wè mwen nan dlo
Fanm dous mwen
Men lavi a tounen toupi nan men mwen”


Après j’avais pris la bague, du coup tout a changé en moi. Je deviens une autre adolescente. Je déteste ma vie d’avant. Tout mon sang devient une autre femme. Je fume. Je bois. Je suis tantôt femme, tantôt homme. Voilà ce que je suis devenue.

Chaque jour je m’installe à Rue 4 devant la Cathédrale pour regarder les passants. Surtout les femmes. Je prends plaisir dans les fesses de jeunes filles qui franchissent la route. Mes yeux deviennent des appareils de photos. Ils font les photos des fesses. Mon cerveau les enregistre pour enfin me masturber le soir. Ma vie c’est tout ça. Un peu de sang, un peu de vin. Je vis mon quotidien à tout ce qu’il m’apporte.
Donc j’aime la vie que je mène.


À présent, je décide de quitter la maison de mes parents pour enfin sortir dans ma routine depuis tant clandestine. Mon monde m’attend. Je veux déménager. Je casse la tête, où je vais trouver de l’argent parce que dimanche prochain je devrais quitter la ville. Ouff Èzili ouvre la barrière pour moi. En ce moment, je fume. Je bois. Je me rappelle la dernière fois un pénis m’a pénétré profondément. Comme si c’était hier. J’ai versé des larmes comme si j’allais mourir. De toute façon, il y a quelquefois du bonheur dans la douleur.
Ouff ça me donne envie. Je dis paix à ma pensée…


Je n’ai pas encore la tête d’une écrivaine, pas non plus d’un philosophe, mais je questionne. Je ne comprends toujours pas pourquoi dans les sociétés certains principes nous sont imposés. Pourquoi construisent des prisons ? Sans doute pour nous empêcher de voler etc. Les principes sont généralement créés pour nous déposséder de tout ce qui nous est naturellement propre. Pourquoi la société me sanctionnera si je couche à mon frère ou du moins à ma sœur ? Puisque c’est une envie qui vient tout naturellement. Merde je suis folle. Bon je dis paix à ma putain de bouche.

J’en ai marre des principes, des normes et des règles. Ils sont là pour réduire notre liberté. Pour nous reconstruire mentalement de ce que nous sommes vraiment. Tout ce qui est interdit à nous, c’est parce que nous le sommes. Je veux que l’hypocrisie arrête. Moi je fume. Je patauge dans l’alcool. Je recouds le passé.

Et voilà, depuis plus d’une semaine, je prends la plus noble décision de ma vie pour enfin vivre pleinement ma vie. Je quitte la maison de mes parents.


Une semaine après qu’elle quitta la maison, sa mère Kenoue s’inquiéta. Son corps usé, son visage devient famélique, amaigri. Elle porte sur les épaules un fardeau plus lourd que le temps. Du coup elle songea sa mère Sandra qui fut morte depuis vingt ans. D’après le reste membre de la famille, elle a été tuée par Ti Pierre le plus grand praticien de la sorcellerie du quartier. Il lui a donnée un  "argent monté". Elle hurla. Cria. Disait : « manman fanm chans mwen » je cite ton nom, mais je ne te détourne pas. Où est passée ma fille ? La chair de ma chair. La douleur de mes entrailles. En ce moment- là, elle cria de toute sa force, elle ramassa une poignée de poussière, disait : tu es assez jeune pour que la mort impitoyablement arrache ton souffle. Le cri était tellement fort, il parcourut une vitesse plus rapide que celle de la lumière. Frappa profondément l’oreille gauche de Ti Paul son voisin qui, le mois dernier a levé et battu un zombi. Il pratique cette routine depuis qu’il a dix-huit ans. Il a cinquante-six ans, son épouse lui a reproché, critiqué la vie qu’il mène. Mais il a la tête plus dur que l’acier. Il refuse. Il chercha la direction du bruit. Voilà chez Sandra. Quel est donc son problème ? Il fait déjà minuit. En ce temps il rhabille et porte une chemise mal boutonnée.
-Chérie notre voisin est en danger, j’ai entendu un grand bruit chez lui. Je vais lui porter de la main forte.
-Vas-y mon homme, mon corps est usé. Je ne peux pas t’accompagner. Vas-y!

-Ma commère la famille est en danger, je ne demande pas aucune permission. Je suis rentré. C’est comme ça il appelle toutes les femmes du quartier, commère!
- Ma fille, ma fille. Répond Sandra
Qu’est-ce qu’elle a commère ?
-Soupira, disait une autre fois, ma fille, ma fille.
-Elle est enceinte ?
-Non, répliqua Ramus le benjamin de la famille qui a seulement cinq ans. Elle quitta la maison. Il y a quelques jours.
-Dios que pasa ? es malo. Depuis la mort de sa mère qui a reçu un coup de poudre, il a été séjourné en République Dominicaine plus de deux ans. Il sait balbutier en Espagnol.
Il est ainsi pauvre Ti Paul. Il aime prononcer des paroles grossières. La semaine dernière, il appela
Jeanine. Elle refusa. Il l’a traitée de BOUZ*


Ma, la vieille, elle a une couleur basanée. Des cheveux crépus blancs. Elle porte des bijoux. Une grosse montre dans son bras gauche. Quand on lui demande de l’heure, elle regarde le soleil. Indique l’heure. Mais c’est Toujours : 1h00,3h00 etc. Elle n’ajoute jamais de minutes. Tout le monde doute fort que tante Ma maitrise bien son horloge. Les enfants du quartiers, faroucheurs qu’on ne peut plus, ne laissent pas sa santé tranquille.

Tant D’autres répondent 5h. Ma quelle heure fait-il ? C’est la plus âgée du quartier. Ma, Veuve depuis dix ans, son époux était chauffeur de taxi sur Duvalier a été appréhendé et passé un mois d’emprisonnement parce qu’il disait vive la démocratie en sortant de la prison deux mois plus tard mort raide. Depuis ce temps, elle vend, tous les matins, du café. Tous les jeunes gens du quartier lui doivent 15, 20,30 gourdes de café. Bref!!


Apportez les wiskies madame, tenez messieurs. Aujourd’hui on va faire un débat littéraire, non disons je vais vous parler de littérature. D’un grand écrivain qui a sa place dans toutes les bibliothèques du monde.

André cite l’étranger de Camus ? Tais-toi André ,bon dis-moi qu’est-ce tu sais de littérature, il faut m’écouter n’est-ce pas ? Je vais vous parler d’un grand qui a su dépeindre notre réalité de peuple dans un roman réaliste. Justin Lhérisson voilà le nom. Vous en connaissez hein ?


Une femme arrive dans le bordel. Elle salue les gens avec sa corpulence.

Oh putain! Quelle est cette femme qui vient déranger mon esprit avec son corps ?
André : qui sait ? Je l’ai vue pour la première fois Byron.
Byron réplique moi aussi mon très cher frère. On parlait de la littérature, elle est la littérature elle-même. Son arrivée me casse.
Paul : regardez ses hanches, ses cuisses. Préparez-vous, c’est de la viande fraiche.

Bonsoir monsieur, c’est vous le directeur ? -Oui c’est moi.
Je m’appelle Natacha. Elle longe sa main au directeur ,ça vous dit quelque chose ?
- Si, venez donc Natacha. Voici votre chambre. C’est le numéro 2. Déposez votre valise.
Merci dit-elle.


Ce jour-là, la nuit se faisait tapocher par les étoiles ,la nuit avait peur de la nuit. Les gars quittaient le lieu parce qu’ils ont trop bu. Ils gagnaient les rues. Un silence les a répandus sur leur visage. Après une longue marche sans rien dire, enfin André arrache un mot. Écoutez mes amis, un jour le monde sera dans l’urgence , l’arrogance des humains prendra fin. Seuls les mots auront la capacité de porter la souffrance humaine. Les rêveurs, les jongleurs de mots placeront au centre du monde. Ce sont eux qui redonneront sens à la vie. En vérité, en vérité, en vérité…

Manno regarda André avec un visage convaincu et tapota son épaule gauche. Secoua la tête. Ils ont continué la route. Le temps est témoin d’un temps qui a peur du temps. Quelques minutes après André appela Manno et disait mon ami-frère garde cette parole en toi, ne le dit à personne. Ramus soupira, resta dans son profond silence.il avait une parole trop lourde sur sa langue. Finalement il la cracha sur ses amis. Disait avec un visage triste demain n’est pas garanti.


Ils sont passés sur la place bouteille des Gonaïves, ils se sont assis à côté de Martine la marchande de clairin. Tous les jours elle se lève de bonheur pour venir vendre. Les grands consommateurs de clairin l’attendent comme d’habitude. La journée commence à huit heure et prend fin à 18h. –
Martine chérie, je paye le clairin de la semaine passée, me vendre pour 50 gourdes, d’autres pour 100. Ils boivent leur chagrin,oublient que la vie est faite aussi de travail, des gens devenus chômeurs dans un pays trop petit pour être riche. Ils discutent de tous. De femmes. De la politique. De la vie puis merde…

Du même moment, des enfants, visage amaigri, efflanqué, lyre de la souffrance, de la douleur, de la misère font des va- et –vient et le tour de la place, quémandent. Portant des vêtements sales, déchirés. Ils abandonnent leur famille déjà pauvre. Ils vivent là, ils y mangent aussi. Quand ils demandent et ne reçoivent rien, ils meurent de faim, avalent leur salive. Ils s’endorment sur les kiosques puis dire au revoir à la journée, bonsoir la nuit.


Tous les midis de la semaine, les grands consommateurs de clairin vont chercher leurs enfants de l’école. La majorité des enfants fréquentent des petites écoles moins chères, manque de l’argent de leur parent l’exige. Les rares enfants qui fréquentent de bonnes et grandes écoles sont généralement boursiers vu leur performance dans la salle, d’autres, un membre de famille ou un ami de leur parent résidant à l’étranger paye annuellement l’écolage. Seules les poussières sont gratuites dans ce pays. Des pères avec des diplômes sont économiquement faibles. Ils emmènent les enfants à la maison, puis retournent chez Martine sur la place bouteille. Quand ils commencent à être ivre, ils l’appellent manman lavi.

À quelques kilomètres de la place bouteille se trouve le palais de justice des Gonaïves. On rencontre, voit en bande des avocats bien sapés, bien costumés. Souliers bien cirés faisant des va -et -vient sur la cour, parfois attendent les clients devant les barrières avec des bouts de phrases françaises sur la pointe de leur langue.

Vous avez quoi madame ? Vous êtes victime de voie de faits ? venez par ici. Chère madame C’est toute une bataille pour qu’ils arrachent mille, deux mille gourdes pour donner à leur épouse en rentrant à la maison.

Sur la cour du palais de justice, il y a une certaine de Madeleine, marchande ambulante autorisée. Elle monte son tonnelle avec des tôles rouillés, un banc à l’intérieur, la cage fait énormément chaud. Des avocats achètent à crédit payent sur un mois. D’autres payent à chaque repas.

Parfois, ils mangent sans payer, disent Mad chérie voici ton second mari. Elle sourit, mais au fond très engueulée. Elle a six enfants à nourrir tous les jours. Vendre à crédit n’est pas à son profit. Elle considère les avocats comme des chefs de l’ordre. Elle se plaint, puis se résigne. Elle pense à demain. On ne sait jamais quand elle peut arriver à mettre le pied devant le tribunal. Ils prendront ma défense dit-elle. Puis elle ramasse une force et continuer à les vendre à crédit. C’est ce grand fardeau au quotidien qu’elle porte.


Natacha c’est bien son nom depuis sa nouvelle vie. Assied sur une chaise, sa corpulence charme les gens du bordel. Elle tient la cigarette avec sa main gauche. Elle fait des va-et-vient. Un premier client l'appelle pour passer un bon moment. Elle répond non, désolée, elle fait midi. C'est mon heure d'aller lire.

Depuis sa venue, sa valise remplie de toute sorte de livres. Livre de sociologie, médecine, essai historique, politique, roman, philosophie etc. Elle rentre. Elle ferme la porte. Maquis de Sade est son philosophe préféré. Perdu dans " la philosophie dans le boudoir). Acompagnée de sa cigarette et du wisky. Portant une petite culotte tanga et un soutien- gorge.

En ce temps là, depuis sa disparition, sa mère ne cesse pas de fréquenter les houngans de la zone pour voir comment elle pourrait faire une expédition pour qu'elle revienne à la maison. Elle est sur une dizaine de houngans, pas de solution, la fille ne revienne. Le dernier houngan l'a demandée cinquante mille gourdes et un beuf jaune pour des sacrifices. Et lui donne un délai de 7 jours pour le retour de la fille.

Le père ,quant à lui, depuis la scène ne mange pas beaucoup il perd d'appétit. Il devient amaigri. Assied sur une chaise en bois avec sa pipe. Le matin, il prend du café. Attendant demain pour un nouveau café. C'est comme ça, il gère son quotidien.

Ramus, lui-même, va à l'école, vit avec des sequelles de cette tragédie qui l'empêche d'apprendre normalement. Sa mère oblige de lui envoyer chez maitre Daïko pour renforcer sa capacité d'apprentissage,donne le maitre 1000 gourdes par mois. Tout se fait dans sa petite commerce de café dès le matin.

Enfermée dans sa chambre. Après sa lecture, elle rédige un article sur l'enjeu et sur l'émergence de la femme haïtienne d'aujourd'hui qui va publier dans le journal ligue des femmes. Ce sera son deuxième article publié. À travers ses articles, elle se fait féministe et militante politique.

En ce temps là, les clients frappent à la porte pour des moments. Vu sa corpulence, elle est trop demandée. Depuis sa venue, les anciennes prostituées ne sont plus demandées qu'auparavant et deviennent jalouses. Elles se décident de monter un complot contre elle. Aller voir un houngan pour semer sur sa chaise un coup d'poudre.


À Suivre!!

Feguerson Fegg THERMIDOR

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La Rédaction 213

Kafounews

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