Haïti: la caverne d’Ali Baba

Haïti: la caverne d’Ali Baba

Le peuple haïtien à l’arrivée de chaque nouveau contingent de militaires/policiers étrangers de la force multinationale, tel un enfant croyant au Père Noel, espère une amélioration rapide de sa situation sécuritaire. Et, à chaque fois, la déception se mesure à l’aune de l’espérance. Ce peuple-enfant n’est pas au bout de ses peines. Entretemps, Port-au-Prince nécropole avec sa cohorte de cadavres jonchant les rues au quotidien, incapable d’enterrer ses enfants dans la dignité, s’éteint à petit feu au rythme des attaques sanglantes, des tueries des gangs armés, combattus par des forces de l’ordre pourtant dépassées. La violence alimentée par des mains obscures- que l’on connait tous- s’étend à d’autres villes, d’autres départements du pays dans la passivité complice des dirigeants.
 
Un événement marquant vient se greffer aux nombreux conflits larvés en gestation/ouvert notamment celui entre les factions de la Primature et de la direction générale de la Police Nationale, pour la gestion de l’insécurité dans le pays: l’arrêt bâtard de la Cour d’Appel de Port-au-Prince. En effet, cette décision met en relief l’absence de rigueur et de raisonnement juridiques dans la magistrature haïtienne. La Cour d’Appel a erré en décidant par analogie dans une matière, droit pénal, obéissant à un impératif de stricte application de la loi. Les magistrats Ponce Pilate se lavent les mains du sang de tout un peuple. Le débat malgré tout, se situe pour nous ailleurs.
 
Ainsi, cet arrêt apporte de l’eau au moulin des « braqueurs de la Banque Nationale de la République d’Haïti » qui, la honte étant une passion humaine, refont une entrée, qu’ils espèrent triomphale, sur le devant de la scène politique. Les trois conseillers-braqueurs et brasseurs veulent à tout prix soutirer le maximum de profits de leur nouvelle situation après de longs mois sur la touche. Il faut se rattraper ! Pour y parvenir l’un d’entre eux doit évincer Fritz Jean et accéder au fauteuil présidentiel. Un coup d’état se prépare au Conseil Présidentiel. Un bandit cachant un autre, la solidarité des chimères en pantoufles se calque sur celle de leurs alter ego en col blanc ou vice versa. Comme ces enfants des bidonvilles, les conseillers-braqueurs opèrent en bande organisée. Le sang de cette République ne laisse jamais de trace!
 
Les bébés jetés dans les flammes, les personnes âgées exécutées froidement, les jeunes filles et les femmes agressées et violées, les familles abandonnées sur le pavé, les déplacés et autres infortunés victimes tant dans leur chair que dans les riens qui leur servent de propriétés, doivent se démerder tous seuls. L’État, cet État, depuis l’assassinat de l’Empereur Jacques Ier, fait de l’exclusion la pierre angulaire de sa politique vis-à-vis des citoyens ordinaires. Time is money, le temps c’est avant tout de l’argent les conseillers-braqueurs veulent s’en mettre plein les poches en vue de se payer un exil doré aux États-Unis d’Amérique, la terre promise des fossoyeurs d’Haïti. D’ailleurs, ils auront de quoi financer leur voyage et partir en pleine nuit comme des voleurs. Mais, ils sont des voleurs me direz-vous. Avec l’âge, on a la mémoire qui flanche comme le chansonnier français, Yves Duteil.
 
Dans un contexte international ou les regroupements politiques d’extrême droite gagnent en sympathie et semblent plus que jamais déterminés, et en bonne position en vue de prendre en main la destinée de leurs pays, la question migratoire devient un enjeux majeur. Les débats politiques souvent creux durant les campagnes électorales s’animent dès que ce sujet est abordé. Nul doute donc que les haïtiens stigmatisés un peu partout attendent impatiemment des signaux positifs de la mère patrie. Un retour chez soi devient impérieux dans la perspective de vivre pleinement son humanité. L’humiliation de millions de compatriotes ne pèse pas dans la balance des intérêts particuliers du politique haïtien. Le sang de tous ces malheureux, en quête de lendemains meilleurs, versé en terres voisines ne salira pas la moquette immaculée de la « conscience » ni des magistrats de la Cour d’Appel de Port-au-Prince ni des conseillers-braqueurs, nos princes.
 
Le Conseil présidentiel ainsi que l’ensemble du gouvernement se contentent purement et simplement de percevoir leurs émoluments du Trésor public. À la fin de leur mandat présidentiel, la transition laissera les caisses de l’État vide et Port-au-Prince, ville fantôme, nécropole, sera réduite en l’état exigé par les commanditaires nationaux et internationaux. À quelle fin ? Nous savons pourquoi. Ils savent que nous savons pourquoi. Nous savons qu’ils savent que nous savons, pourtant tout le monde fait semblant de ne pas savoir.
 
Dans ce simulacre tous les acteurs, malgré les masques, sont identifiés. Seul un sursaut brutal de la population peut subvertir l’ordre établi depuis longtemps, depuis trop longtemps même. Néanmoins, le PHTK en famille et alliés a décidé récemment de pérenniser l’ordre susmentionné en y ajoutant plusieurs couches, l’agrémentant de son savoir-faire hors du commun tout en le faisant savoir. Cette attitude méprisable des bandits légaux en famille et alliés étale au grand jour la cécité et la surdité tactiques de la justice. En attendant, Haïti, nécropole de la Caraïbe, est devenue la caverne d’Ali Baba, seuls les voleurs possèdent les compétences requises pour y avoir accès et occuper les plus hautes fonctions dans l’État.
 
 
 
Cowansville, 24 février 2025    
Franck S. VANEUS, av.

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Franck S. Vanéus 45

Avocat et Philosophe...

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1 Commentaires

  • Frantz

    March 01, 2025 - 10:33:12 AM

    Très bel article, mais pour quelle audiance! L’ensemble des gens honnêtes dans la diaspora et en Haiti savent dejà tout cela! Aucune solution en vue. On veut é veiller la conscience de qui?