La volonté de la communauté internationale, conduite par les Etats-Unis, de se donner bonne conscience en organisant des élections dont les issues sont presque connues d’avance, pour porter au pouvoir des hommes et des femmes mus par l’appétit féroce de posséder que par la volonté de changer les conditions d’existence de l’homme haïtien, risque de jeter de l’huile sur le feu.
L’assassinat du président de la République en son domicile dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, abandonné par sa garde et lâché par ses alliés, met à nu le malaise profond d’une société en crise depuis des décennies.
La gabegie administrative, la concussion, le népotisme, la violence aveugle, l’indigence des dirigeants… sont autant de maux qui décomposent la société au point de la rendre exsangue. Ayiti, plus que jamais se retrouve au bord du gouffre. L’embrasement général cogne avec fracas. Le changement de paradigme devient absolue nécessité.
Les disparités criantes entre les différentes strates de la société haïtienne étalent au grand jour les limites de cet ordre déshumanisant. La société le supporte comme l’esclave ses chaînes. Le degré de putréfaction des institutions démontre que les changements sont nécessaires. L’amputation est inéluctable. Il faut simplement une prise de conscience. Le peuple Ayisyen se doit de comprendre que son présent, est le fruit d’un passé oublié, parce que occulté savamment par les puissances colonialistes, impérialistes et leurs hommes de mains, ceux auxquels elles confient les basses œuvres de l’intérieur.
Les classes possédantes ont, dans le contexte actuel, presque tout à perdre. Ceux qui n’ont pas grand-chose ne risquent rien. Les classes dirigeantes ne peuvent plus pratiquer la politique de l’autruche. S’il existe, des industriels haïtiens nationalistes et patriotes, goutte d’eau d’humanité et dignité dans un océan d’indifférence et de néocapitalisme sauvage, ils peuvent enclencher ce que Marx appelle la révolution partielle. Cela congédierait une bonne fois les visées anarchiques du G-9.
Le G-9 est une abjection dans son expression. Pourtant, il charrie fondamentalement le mal-être de la société profonde. En effet, la violence systématique dont il fait montre répond à une violence plus inhumaine encore consistant dans le délitement des classes moyennes et la paupérisation accrue des masses. Cette pauvreté artificielle puisque provoquée par les nantis au pouvoir ne saurait disparaître par le simple renouvellement du personnel politique. Il faut la dissolution de l’ordre social actuel.
La volonté de la communauté internationale, conduite par les Etats-Unis, de se donner bonne conscience en organisant des élections dont les issues sont presque connues d’avance, pour porter au pouvoir des hommes et des femmes mus par l’appétit féroce de posséder que par la volonté de changer les conditions d’existence de l’homme haïtien, risque de jeter de l’huile sur le feu. Aujourd’hui, le dénuement total dans lequel vit la grande majorité ne laisse aucun doute sur les conséquences du tsunami politico-social qui ne manquera pas de propulser vers les abîmes la société dans sa globalité.
Le salut du pays passe par une prise de conscience de possédants nationalistes et patriotes et de politiques véritables hommes et femmes d’état. Sinon, un matin, au plus profond de la nuit, surgira un grondement assourdissant et toutes les chaînes séculaires seront brisées. Rien ni personne ne sera épargné. Toutes les conditions sont désormais réunies pour amorcer la révolution partielle au sein de cette société moderne, en apparence, féodale dans sa réalité. En fait, elle sera partielle dans son expression si elle est canalisée par la strate éclairée de la classe possédante, consciente qu’un branle bas général précipiterait la chute vertigineuse de tous.
L’heure n’est plus aux discours creux sans substance. L’heure est à la praxis. Il faut redistribuer les richesses. L’état ayant échoué ces trente dernières années à jouer ce rôle de régulateur, les écarts entre les fils et filles de ce pays se sont creusés, décuplés au point que certains- quelques-uns- vivent au XXIème siècle, le reste de la société croupit dans une misère datant du moyen-âge.
Bien sûr, les élections constituent la condition sine qua non de renouveler le personnel politique mais elles ne vont pas créer de meilleures conditions d’existence pour tous. Seul un véritable changement radical dans les mentalités peut générer la révolution partielle dont la société a désespérément besoin.
Sinon, gare à nous. Le pays n’acceptera pas un autre Jovenel Moïse qui, du reste, est mort comme il a vécu.
Washington 24 Juillet 2021
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